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Le « chaos » de l'« alliance brun-rouge » : face à la censure, l'éditocratie en roue libre


by: Pauline Perrenot

Le « chaos » de l’« alliance brun-rouge » : face à la censure, l’éditocratie en roue libre

par Pauline Perrenot,

Face à la censure du gouvernement, l’éditocratie joue son rôle traditionnel de gardien de l’ordre. Après avoir passé des mois à caresser le Rassemblement national dans le sens du poil, salué pour sa capacité à « raisonnablement » négocier avec la droite gouvernementale sans que cette dernière n’ait à justifier en quoi que ce soit ce positionnement politique, les professionnels du commentaire rejouent subitement une posture traditionnellement à l’œuvre lors des entre-deux-tours : le « cercle de la raison » face aux « populistes » et aux « extrêmes ».

« Comment la censure du gouvernement actuel pourrait-elle être autre chose qu’un malheur ? » Quelques jours avant la chute de Michel Barnier, cette sentence du Figaro (2/12) reflétait l’état d’esprit de bon nombre de chefferies médiatiques. Et c’est peu dire qu’elles l’ont fait savoir. À l’antenne de LCI (3/12), Caroline Fourest y voyait d’ailleurs là « le devoir des éditorialistes » : « dans leur grande diversité, dans leur grande variété », comme chacun sait, « ils sont quand même tous un peu effondrés. […] Géraldine [Woessner] parlait d’immaturité de notre classe politique. C’est-à-dire qu’on est quand même extrêmement doués, dans une démocratie qui n’allait pas si mal en dehors de son déficit abyssal, pour se rajouter des problèmes. » À l’heure où des dizaines de milliers de licenciements sont annoncés et déjà en cours – parmi moult symptômes de cette « démocratie qui ne va pas si mal » – cette arrogance de classe n’en reste pas moins la norme parmi les professionnels du bavardage. Lesquels déclinent leur mantra sur tous les tons : « Une censure et le chaos », titre par exemple en Une La Nouvelle République (5/12).


« Fracas, échecs, déprime » : l’annonce du chaos économique


Dans les studios, les mines déconfites des journalistes économiques se succèdent. Lunettes embuées sur le nez, François Lenglet donne le ton : « Je suis inquiet. Vraiment inquiet », lance-t-il d’emblée, sans renoncer pour autant à sa combativité : « On est dans un déni de réalité collectif. […] On espère échapper à cette vérité simple : il n’y aura pas de rétablissement financier, il n’y aura pas de redressement de la France sans une refonte profonde du modèle social. Vérité qui finira d’ailleurs par s’imposer ! » (RTL, 5/12) « Vite, la crise ! » réclamait d’ailleurs L’Opinion la veille, rejouant le tristement célèbre duo Antenne 2 - Libération de 1984. L’illustre Nicolas Beytout était évidemment à la manœuvre : « Seul un choc violent pourra rompre cet enchaînement fatal, alors il reste à espérer qu’arrive vite la crise. La vraie, celle qui fera prendre conscience aux Français qu’aucun des scénarios envisagés aujourd’hui ne suffira pour redresser le pays. Celle qui donnera une chance de rebondir sur une nouvelle politique, seule à même de remettre la France sur de bons rails. » (4/12) Souhaiter ouvertement « un choc violent » et une « vraie crise » pour le pays : voilà à quoi mène l’intégrisme de marché de cette éditocratie qui s’estime pourtant rationnelle, raisonnable, nuancée et responsable !

Les jours précédant le vote de la motion de censure, les bataillons du groupe de Rodolphe Saadé étaient eux aussi en ordre de marche pour distiller la peur : « Au total, rien que sur l’impôt sur le revenu, les Français paieraient 3 milliards d’impôts sur le revenu en plus si on reconduisait le budget 2024 ! » alertait par exemple Emmanuel Lechypre (RMC, 3/12), tandis que sur BFM-TV, Nicolas Doze dissertait sur « le prix de la censure » : « Combien de croissance envolée ? Combien d’emplois ne verront pas le jour ? Où sera le taux de chômage ? » Se prenant subitement d’affection pour « tous ces fonctionnaires qui n’auront pas de revalorisation salariale », il poussait l’hypocrisie au point de regretter les mesures qu’il conspuait la veille : « Les hauts revenus qui devaient être taxés ne seront pas taxés, les grandes entreprises qui devaient être taxées à l’IS ne seront pas taxées. » (3/12) Mauvaise foi, outrances et surtout reproduction servile de la communication gouvernementale : l’éditocratie dans ce qu’elle sait faire de pire.

Dans la même veine, Les Échos fustigent « les mariés du 4 décembre » (5/12) : « Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen unis, sans projet, sans alternative, sans sens des responsabilités », accusés de « sacrifier la stabilité économique, budgétaire et fiscale » ; le journal osant – comme Le Point – faire un parallèle… avec « le 10 juillet 1940 », lorsque « 569 parlementaires - de gauche comme de droite - avaient signé l’arrêt de mort de la IIIe République » en votant les pleins pouvoir à Pétain ! En charge de l’édito de Ouest-France post-censure, le journaliste économique Patrice Moyon s’indigne lui aussi d’un « baiser de la mort » et ressasse le catéchisme : « En empruntant plus cher et en ne s’attaquant pas aux questions de fond, la France se prive de marge de manœuvre pour préparer l’avenir. » (5/12) Même tonalité dans Le Monde (4/12), où Françoise Fressoz semble avoir du mal à atterrir face à ce qu’elle qualifie de « funeste engrenage » et de « sidérante » « plongée dans l’inconnu » : « Jouer l’attentisme, la défausse ou la crise dans un contexte de faible croissance n’est pas le bon pari. […] Plus l’incertitude politique augmente, plus la prime de risque s’élève, avec, pour conséquence, d’alourdir un peu plus la charge de la dette, au risque de limiter les capacités de l’action publique dans les prochaines années. » À l’antenne de France Inter, deux jours après avoir mis en garde contre une « censure destructrice » (3/12), Dominique Seux a le moral dans les chaussettes : « Pourquoi ce qui est possible avec les JO et Notre-Dame – du collectif, de la réussite ! – pourquoi est-ce impossible sur la scène politique et budgétaire où tout est fracas, échecs, déprime ? » (France Inter, 5/12)

De concert, Cyril Hanouna joue les Cassandre pendant dix minutes en continu devant une assemblée religieusement à l’écoute :

Cyril Hanouna : Ça va être catastrophique, sachez-le ! C’est dramatique ce qui se passe. […] Ce que ça va changer pour les Français, c’est que ça va encore les foutre encore plus dans une situation critique puisque ça veut dire pas de décision prise, pas de budget, […] un pays complétement figé, […] une situation qui va être bien plus dramatique que celle de la Grèce ! […] C’est un chaos total. (C8, 3/12)

Quant à Axel de Tarlé, il se fait comme de coutume le porte-voix du patronat sur France 2 :

Axel de Tarlé : Le Figaro a recueilli quelques verbatims de grands patrons. […] Ils disent 1, c’est l’incertitude à cause de cette censure et 2, c’est l’image de la France dans le monde qui est dégradée. On perd cette image de stabilité. Certain disent : « C’est la honte ! ». D’autres disent […] : « La situation est consternante », ou encore Michel-Édouard Leclerc, qui dit que tout ça, on va le payer : « L’économie est abîmée, dit-il, par la dramaturgie actuelle ». (« Télématin », 4/12)

Qu’on se rassure néanmoins : reprenant mot pour mot un gros titre des Échos, France 2 adresse un satisfecit à la « résistance » du CAC40… On n’en attendait pas moins du service public.



De « l’alliance des extrêmes » au « gaucho-lepénisme »


S’ils n’évacuent pas la responsabilité d’Emmanuel Macron dans la conjoncture politique, les présentateurs et leurs collègues des services politiques savent en revanche où concentrer leur morgue. Quelques instants avant le vote, Anne-Élisabeth Lemoine prenait ainsi son air le plus sévère pour accueillir Manuel Bompard (LFI) : « En quoi avez-vous le sentiment de faire l’histoire, ce soir, avec cette censure ? […] Et la fin justifie les moyens ?! La fin justifie une drôle d’alliance entre les "cheguevaristes de carnaval" et "les complices du Rassemblement national aux côtés de Michel Barnier". […] C’est pas un symbole, justement, sur le plan historique, qui peut interroger ? » (France 5, 4/12) En parallèle, sur tous les plateaux, l’éditocratie trépigne en attendant que « le PS sorte de sa vassalité par rapport à LFI » (Étienne Gernelle, BFM-TV, 5/12), multipliant pour cela les injonctions : « Que n’actez-vous, que n’actez-vous, qu’attendez-vous, qu’attendez-vous pour acter une forme de distanciation ?! » (Apolline de Malherbe à Jérôme Guedj, BFM-TV, 5/12)

Les éditocrates restent ainsi fidèles à ce qu’ils savent faire de mieux : distribuer les bons et les mauvais points et prescrire, prescrire encore, en espérant peser à la fois sur « l’opinion » et sur le champ politique. Au matin du vote de la motion de censure, les grands intervieweurs engageaient d’ailleurs leurs dernières forces dans la bataille : les cadres du RN faisaient alors le plein d’invitations – sur France Inter, France 2, BFM-TV et RMC, par exemple – face à des matinaliers recrachant mot pour mot les éléments de langage du gouvernement. « [Cette motion de censure], ce n’est pas un texte qui est neutre ! C’est un texte qui est politique et que vous allez voter ! […] Ils vont pas vous le reprocher vos électeurs ? Ils ne vont pas vous reprocher de voter le texte des Insoumis qui vous accusent de "viles obsessions" ? » s’exclamait par exemple Léa Salamé face à Jordan Bardella (France Inter, 4/12).

Une posture très en vogue dans les rédactions, qui dit en creux l’espoir que fondait l’éditocratie dans un RN campé en « parti de l’ordre », auquel elle n’avait de fait plus grand-chose à reprocher… La Dépêche résume bien cette petite musique : « [Le RN] a commis une grave faute politique en ratant le dernier virage de la respectabilité : il a préféré la censure à la mesure. » (4/12) Hormis ce petit « loupé » donc, RAS sur le terrain de la « respectabilité » ! Même aveu, même déception du côté du Parisien : « [Marine Le Pen] s’évertuait depuis des mois à gommer le passé de sa formation politique, montrer à quel point le RN était devenu un interlocuteur respectable qui avait le sens de la nation. » (4/12) Ou encore Renaud Dély sur France Info, qui affirme que « [Marine Le Pen] a tombé le masque de la notabilisation pour replonger dans la radicalité anti-système. » (4/12) Du reste, gageons que ce type de verdicts – à l’instar de toute analyse émanant d’un journaliste politique – aura une durée de vie très courte… La veille du vote à l’Assemblée nationale, face au député RN et ancien présentateur de LCI Philippe Ballard, BFM-TV donnait d’ailleurs l’exemple le plus caricatural de ce grand cirque, qui continue d’entretenir, sans en avoir l’air… la normalisation de l’extrême droite :

- Perrine Storme : Philippe Ballard, est-ce que vous êtes un parti d’extrême droite ?

- Philippe Ballard : Non, on n’a jamais été un parti… [coupé]

- Perrine Storme : Mais quand même… Vous allez voter pour un texte qui vous qualifie de parti d’extrême droite ! Donc d’une certaine façon, vous validez ce terme-là…

Vous avez dit misère ?

Dans la roue du pouvoir politique, les chefferies médiatiques renouent ainsi avec la construction frauduleuse d’une « alliance des populistes » (Ruth Elkrief, LCI, 3/12) ou d’une « alliance des extrêmes » (Les Échos, 5/12) contre un « cercle de la raison » assiégé.



Comme le veut la coutume, Le Parisien ne fait pas dans la dentelle et décide de dupliquer sa Une accusatrice dans la double page intérieure, sobrement titrée « La stratégie du chaos » et illustrée par un dessin caricaturant la députée LFI Mathilde Panot en train d’hurler : « Marine, avec nous ! Marine, avec nous ! » Au cas où des lecteurs – vraiment abrutis – n’auraient toujours pas compris le message, le directeur des rédactions Nicolas Charbonneau se charge d’enfoncer le clou : « Les deux extrêmes se retrouvent […] sur une même ligne, préférant la cacophonie aux intérêts du pays. Le gouffre et l’irrationalité à la raison. »

La Dépêche pleure aussi le départ de Michel Barnier à chaudes larmes, dont les « qualités de négociateur » ont été mises à mal par les « apprentis sorciers », « l’irresponsabilité des deux extrêmes de l’Assemblée nationale » et leur « stratégie du chaos » (4/12). Dans La République des Pyrénées, Jean-Marcel Bouguereau condamne une « alliance de la gauche et de l’extrême droite » sur « les décombres du front républicain » : « un spectacle qui fait ressembler notre Parlement à la nef des fous » (4/12). « Ténors de la chienlit », tempête de son côté L’Opinion (5/12). « Une très curieuse conjonction des extrêmes » regrette également La Croix (3/12), qui « déplor[e] une forme d’irresponsabilité » des deux partis : « tous semblent prêts à sacrifier le sort du pays sur l’autel de leurs ambitions personnelles. » « Le Pen-Mélenchon, les deux cavaliers de l’Apocalypse » éditorialise encore Le Télégramme (3/12), une expression qui sera reprise le soir-même par Caroline Fourest sur LCI, ravie de pouvoir en ajouter une couche contre la gauche :

Caroline Fourest : Donc là, il faut quand même pointer la responsabilité de ceux qui jouent avec le feu : Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen. On le voit dans les sondages, jusqu’à présent, LFI était clairement crédité d’être le parti qui fait peur, d’être le parti de l’instabilité, qui attise la violence, qui est dangereux pour la démocratie. (LCI, 3/12)



Et pour tirer les conclusions qui s’imposent, on peut compter sur l’inénarrable Étienne Gernelle, en roue libre sur RTL (4/12) :

Étienne Gernelle : Mélenchon - Le Pen, même combat ! […] C’est donc une alliance, presque une équipe. Alors cette alliance, elle est parfois décrite un peu vite comme une alliance de circonstance, voire une alliance des contraires mais pardon, elle est en réalité très naturelle car RN et LFI ont énormément en commun. Sur l’économie, ils ont la même philosophie de la relance par la demande. […] À la fin, il y a tout de même un vrai socle idéologique commun. L’arc lepéno-mélenchoniste serait peut-être même, dans cette Assemblée fragmentée, celui qui aurait le plus de cohérence philosophique. RN et LFI ont souvent voté ensemble dans le débat budgétaire et ce n’est pas pour rien.

Une chronique de pure désinformation, qui amuse beaucoup les deux présentateurs Thomas Sotto et Amandine Bégot [1], et qui est bien sûr déclinée dans l’hebdomadaire dirigé par Étienne Gernelle… La veille, Serge Raffy dénonçait en effet dans Le Point « le retour d’une forme d’alliance brun-rouge » : « Symbolisée par le concept du fer à cheval, illustrant le fait que dans des moments historiques donnés, l’extrême droite et l’extrême gauche se rejoignent inéluctablement. » (3/12) Interviewé le 3 décembre par « C à vous » et le 4 dans Le Figaro, Pascal Perrineau fait passer le même message :

- Le Figaro : Y voyez-vous une illustration de ce que vous avez vous-même appelé le « gaucho-lepénisme » ?

- Pascal Perrineau : […] Il ne faut pas s’étonner qu’une gauche très prompte à dénoncer le « fascisme » rampant du RN mêle ses voix sans aucune pudibonderie à celles des députés du parti honni verbalement mais fréquentable politiquement. En effet, le rapprochement entre certains secteurs de la gauche et le RN n’est pas une réalité nouvelle. Sur le plan économique et social (retraites, taxation de la spéculation, services publics, antiglobalisation…), les convergences entre les deux extrêmes sont une réalité qui définit un espace où peuvent se mêler des courants apparemment opposés.

Idem dans « C dans l’air », où Nathalie Saint-Cricq dégaine plus vite que son ombre pour être celle qui, parmi quatre invités à l’unisson, répondra à l’une des questions de téléspectateurs opportunément choisie par France 5 :

- Caroline Roux : Cette question de Franck, à Paris : « LFI et le RN ne sont-ils pas plus proches politiquement qu’on ne le pense ? »

- Nathalie Saint-Cricq : Bah si, ils le sont ! […] C’est vrai qu’il y a eu un rapprochement idéologique, c’est-à-dire en gros, un combat pour avoir… alors… le Rassemblement national a choisi les ouvriers, LFI [parmi] les perdants a choisi plutôt les banlieues, mais c’est vrai qu’il y a un certain nombre de discours en commun, sur les riches, les abattre, voilà ! Il y a des choses… un peu de populisme en commun disons !(France 5, 2/12)

Spectaculaire.

Mais le bilan est somme toute ordinaire : à la faveur d’une défiguration permanente du réel, triomphe partout un journalisme de parti pris et de commentaire qui se fantasme conseiller le prince. En l’occurrence, deux jours durant, un déballage de pronostics sur le futur Premier ministre – forcément de droite –, rejoué par les commentateurs en écho au rouleau compresseur qui, il y a quelques mois seulement, veillait à faire oublier les résultats des élections législatives...



***


Haro contre la censure ; anticipation théâtralisée du « chaos » ; centralité du RN dans la mise en scène journalistique de l’actualité ; construction frauduleuse d’une « alliance des populismes » ; saturation de « off » et de « petites phrases » de couloir ; caisse de résonance des postures d’Emmanuel Macron ; course de petits chevaux… Au-delà de son insondable médiocrité, le journalisme dominant fait une nouvelle fois la démonstration de son pluralisme et de sa capacité à s’arranger avec l’actualité politique comme il l’entend, au mépris de toute considération démocratique et avec, pour seul objectif, le maintien de l’ordre.


Pauline Perrenot

 
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France 5, censure, Eugénie Bastié et compagnie : revue de presse de la semaine


by: Elvis Bruneaux

France 5, censure, Eugénie Bastié et compagnie : revue de presse de la semaine

par Elvis Bruneaux,

Critique des médias : une revue de presse hebdomadaire. Si ce n’est exhaustive, au moins indicative [1]. Au programme : du 29/11/2024 au 05/12/2024.


Critique des médias


« France 5, maison d’accueil pour les chroniqueurs de Franc-Tireur », Acrimed, 5/12.

« Chère Eugénie Bastié », Blast, 30/11.

« Antisémitisme : Les indignations à géométrie variable de la presse de droite », Blast, 30/11.

« Après la censure, une matinée de rien sur les chaînes info », Arrêt sur images, 5/12.

« Censure de Michel Barnier : comme un air de "déjà vu" dans les médias », Arrêt sur images, 5/12.

« "Questions bêtes" : la série "documentaire" de TF1 en partenariat avec les lobbys de l’élevage », Vert, 3/12.

« "Fellation", "porno"… la bollosphère surexcitée par l’éducation sexuelle à l’école », Libération, 29/11.

« Thomas Guénolé, nouveau gauchiste préféré des médias de droite », Arrêt sur images, 3/12.

« "Le système médiatique a construit le paradigme de l’Arabe entendable" », Arrêt sur images, 29/11.

« Taxis : l’Agence France Presse a minimisé le blocage de Paris », Off Investigation, 4/12.

« Mais que fait l’Arcom ? I24, une chaine pro-génocide diffusée en France », Le Média, 4/12.


Économie des médias


« Le Groupe Bayard renonce au recrutement d’Alban du Rostu et à sa participation au rachat de l’ESJ Paris », Le Monde, 2/12.

« Les Échos et Radio Classique creusent leurs pertes », L’Informé, 2/12.

« Canal+ plaque la TNT pour mieux sauter en bourse », Les Jours, 5/12.

« Ouest-France discute avec François Pinault pour le tour de table d’OF TV », La Lettre, 4/12.

« Le média en ligne "Slate.fr" va amorcer une "restructuration drastique" », Le Monde, 5/12.

« En Polynésie française, la presse nationale va disparaître des kiosques en 2025 », Libération, 29/11.


Dans les rédactions


« Nicolas Barré devient directeur de la rédaction de "Politico" », Le Monde, 2/12.

« BFMTV va lancer un JT de 20 heures le 6 janvier : le début d’un changement de cap ? », Télérama, 3/12.

« Jeune Afrique se sépare de journalistes expérimentés à l’occasion d’un recentrage stratégique », La Lettre, 2/12.

« La guerre entre Christophe Nobili et l’ancienne direction du Canard resurgit aux prud’hommes », L’Informé, 2/12.


À signaler, aussi


« Filature, cyberespionnage… La surveillance hors norme subie par Ariane Lavrilleux », Disclose, 4/12.

« Arnaques et manipulations : comment Macron a enterré les États généraux de l’information », Blast, 1/12.

« Vianney d’Alançon, le directeur d’école de journalisme qui menace les journalistes », Mediapart, 2/12.

« Israël : "Haaretz" attaqué par l’État, faible intérêt des médias », Arrêt sur images, 2/12.


Et aussi, dans le monde : Grande-Bretagne, Chine, Tunisie, Guinée, Syrie...


Retrouver toutes les revues de presse ici.

 
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France 5, maison d'accueil pour les chroniqueurs de Franc-Tireur


by: Maxime Friot

France 5, maison d’accueil pour les chroniqueurs de Franc-Tireur

par Maxime Friot,

L’antenne de France 5 étant largement dédiée aux émissions de bavardage mondain, le recours aux professionnels de la parole est inévitable… pour ne pas dire systématique. Au-delà de ce constat, un aspect saute aux yeux : la chaîne publique s’est constituée en véritable maison d’accueil pour les chroniqueurs de Franc-Tireur.

Il n’est qu’à moitié étonnant de voir les figures de Franc-Tireur saturer les plateaux télé. De fait, ses trois illustres cofondateurs – Caroline Fourest, Raphaël Enthoven et Christophe Barbier – n’avaient pas attendu la fondation de l’hebdomadaire fin 2021 pour squatter les antennes.

Mais tout de même : entre le 1er janvier 2022 et le 30 novembre 2024, ils cumulent à eux trois 98 invitations sur France 5. Si on ôte les 62 passages (!) de Christophe Barbier dans « C dans l’air », il reste 36 épisodes. Et c’est l’émission « C à vous » qui se démarque : Raphaël Enthoven et Caroline Fourest y ont été invités 8 fois chacun, quand Christophe Barbier n’a dû se contenter que de 5 émissions. On les retrouve aussi dans les (nombreuses) autres émissions de France 5, comme « C médiatique », « C ce soir », « C politique » ou « C l’hebdo » (3 invitations cumulées à chaque fois). Bien que moins assidues, « La Grande librairie » (Enthoven, 1 fois) et « En société » (Fourest, 1 fois) ne manquent pas à l’appel. Pour compléter le tableau, précisions que Caroline Fourest a aussi eu les honneurs de « C dans l’air » (1).

Récapitulons : depuis 2022, Raphaël Enthoven a fréquenté un plateau de France 5 à 16 reprises. Caroline Fourest a eu droit, dans le même temps, à 13 invitations.



Mais ce n’est pas tout. L’équipe de Franc-Tireur compte d’autres débatteurs, Olivier Babeau étant particulièrement prolifique, notamment en raison de son statut d’invité récurrent de « C ce soir » : 16 invitations depuis 2022… auxquelles il faut ajouter 4 passages dans « C dans l’air » et 3 sollicitations supplémentaires, respectivement dans « C à vous », « C politique » et « C l’hebdo ». À côté, Tristane Banon (« C à vous », 3 fois) et Rudy Reichstadt (« C à vous » et « C ce soir », 1 fois) sont de petits joueurs. Et que dire de Jean Garrigues, qui cumule 16 invitations à « C dans l’air », 15 à « C ce soir », 3 à « C politique » et 1 à « C à dire » ?

Au total, ce sont donc 161 passages depuis 2022 : soit, en moyenne, un émissaire de Franc-Tireur présent chaque semaine sur France 5.



La tapis rouge crève les yeux… mais la chaîne publique est loin d’être une exception dans le PAF. BFM-TV, par exemple, aura sur la même période distribué une centaine d’invitations à ces différents chroniqueurs, et ce, sans compter les interventions de Christophe Barbier. LCI n’est pas en reste, avec une quarantaine d’invitations, auxquelles il faut ajouter la présence quasi quotidienne de Caroline Fourest dans « 24h Pujadas ».

France 5 ne détient donc pas le monopole… mais joue bel et bien un rôle central dans la surface médiatique totalement démesurée octroyée à cet hebdomadaire.



Maxime Friot

 
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Morandini, Bayard, LVMH et compagnie : revue de presse de la semaine


by: Elvis Bruneaux

Morandini, Bayard, LVMH et compagnie : revue de presse de la semaine

par Elvis Bruneaux,

Critique des médias : une revue de presse hebdomadaire. Si ce n’est exhaustive, au moins indicative [1]. Au programme : du 22/11/2024 au 28/11/2024.


Critique des médias


« France Inter, Sciences Po et la Palestine : marginaliser les étudiants, invisibiliser les revendications (2/3) », Acrimed, 22/11.

« France Inter, Sciences Po et la Palestine : "nuance" ou calomnie ? (3/3) », Acrimed, 27/11.

« Immigration : pour faire la retape de Bruno Retailleau, la Bollosphère lui invente un bilan », Libération, 24/11.

« Écoles de journalisme : la fabrique du conformisme bourgeois », Blast, 24/11.

« Morandini, le pestiféré devenu soldat zélé de Bolloré », Mediapart, 26/11.

« Experts en rien, présents sur tous les plateaux de BFM à Cnews... Enquête sur la plaie des toutologues », L’Humanité, 28/11.

« Apologie du terrorisme : mensonges politiques et faillite médiatique », Blast, 28/11.

« Ni oui, ni non, ni Bolloré : le grand jeu des "40 ans de Canal+" », Arrêt sur images, 24/11.

« Dieselgate : l’Allemagne sanctionne Hyundai, silence des médias », Arrêt sur images, 22/11.

« Valence : après les inondations, torrent de fake-news dans les médias », Arrêt sur images, 22/11.

« France 2 et "l’excentrique" Boris Johnson », Arrêt sur images, 23/11.

« Mandat d’arrêt Netanyahu : "est-ce qu’on réalise ?" », Arrêt sur images, 23/11.

« Ajax - Maccabi : Amsterdam au cœur d’une improbable inversion de réalité », Blast, 22/11.

« Arrestation de Boualem Sansal : à la télé, l’impossible débat ? », Arrêt sur images, 27/11.

« Mandat d’arrêt contre Netanyahou : pourquoi les "experts" de plateau pleurent (avec Pascal Boniface) », Le Média, 27/11.


Économie des médias


« La Provence aborde 2025 sous le signe de l’austérité », La Lettre, 25/11.

« "Toutes les options sont sur la table" : en déficit, Le Parisien se prépare à se serrer la ceinture en 2025 », Le Figaro, 27/11.

« Le gouvernement relance la réforme de l’audiovisuel public », Le Monde, 27/11.

« BFM TV : Rodolphe Saadé sermonne son état-major », La Lettre, 27/11.


Dans les rédactions


« Médias : le groupe Bayard ("la Croix") en grève pour signifier son rejet "viscéral" de l’extrême droite », Libération, 27/11.

« RMC, BFM : les syndicats majoritaires interpellent l’Arcom pour obtenir une charte », L’Informé, 27/11.

« "J’ai été mis au placard, tout juste bon à faire des micros-trottoirs", à France Télévisions, les syndicats déposent un droit d’alerte contre leur direction », L’Humanité, 27/11.

« "Violence inouïe", "abattoir" etc : des journalistes dénoncent les méthodes de France TV », Blast, 28/11.

« Après 13 ans sur France Télévisions, le journaliste politique Guillaume Daret quitte le groupe public pour BFMTV », Puremédias, 26/11.

« Marine Vlahovic, mort d’une correspondante », 27/11.


À signaler, aussi


« C8 écartée de la TNT : le Conseil d’Etat juge le recours de la chaîne "irrecevable" car déposé trop tôt », Le Monde, 22/11.

« Libération, Le Nouvel Obs, Le Canard Enchaîné… Rachida Dati, la serial plaignante », L’Informé, 26/11.

« L’Arcom pressée de faire respecter les sanctions européennes contre les médias russes », La Lettre, 28/11.

« Au procès Squarcini, les ordres de LVMH pour infiltrer le journal "Fakir" », Mediapart, 23/11.

« Procès "Squarcini" : la responsabilité du fondateur de LVMH doit être clairement établie quant à l’espionnage de la rédaction de Fakir », RSF, 27/11.

« Les médias doivent-ils quitter X ? », Arrêt sur images, 25/11.

« "Le gouvernement de Michel Barnier va tomber" : L’Élysée dément les propos rapportés d’Emmanuel Macron dans "Le Parisien", le journal maintient ses informations », Puremédias, 28/11.


Et aussi, dans le monde : États-Unis, Espagne, Hong Kong, Philippines, Bénin, Turquie, Mali, Inde, Bangladesh, Nicaragua, Maroc...


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France Inter, Sciences Po et la Palestine : « nuance » ou calomnie ? (3/3)


by: Pauline Perrenot

France Inter, Sciences Po et la Palestine : « nuance » ou calomnie ? (3/3)

par Pauline Perrenot,

Amplifier la « polémique » plutôt qu’informer, marginaliser les étudiants et reléguer leurs revendications au second plan : tels sont quelques-uns des mécanismes analysés dans les deux précédents articles consacrés à la manière dont France Inter a couvert, entre les mois de mars et mai 2024, les mobilisations étudiantes à Sciences Po en soutien de la Palestine. Il était alors principalement question de la fabrique routinière de l’information et des pratiques par lesquelles le journalisme ordinaire en arrive à défigurer un mouvement social. Dans ce troisième et dernier volet, nous nous intéressons davantage à « l’éditorialisme », entendu comme l’exposé de partis pris. Trois exemples parmi le meilleur du pire.


« Questions politiques » : les éditorialistes-intervieweurs


L’émission « Questions politiques », diffusée sur France Inter et France Info en partenariat avec Le Monde, constitue un très bon thermomètre de l’éditocratie. Chaque dimanche en effet, le service public confronte un invité à une présentatrice et deux – voire trois – intervieweurs, qui livrent leurs préoccupations à travers le choix de l’invité et des sujets qu’ils abordent, la sélection et la formulation des questions qu’ils posent, la manière qu’ils ont d’accueillir les propos de leur interlocuteur, etc. Dès l’ouverture de l’émission, ces intervieweurs sont en majesté : c’est la rubrique « L’image de la semaine », au cours de laquelle ces têtes pensantes sont invitées à partager un cliché qui les aura particulièrement marquées, avant, bien sûr, de le commenter ; l’un n’allant pas sans l’autre, tant il va de soi que l’un comme l’autre sont d’un intérêt capital pour les auditeurs…

C’est ainsi que le 28 avril, par exemple, tout un chacun trépigne en attendant de connaître ce qui aura retenu l’attention de Guillaume Daret au cours de la semaine passée. Il se trouve que ce jour-là, comme sa consœur Nathalie Saint-Cricq quelques semaines plus tôt, le chef adjoint du service politique de France Télévisions a choisi une photo de Sciences Po, « bloqué et occupé par des manifestants pro Gaza ». Sic. Pas la moindre information n’est donnée sur l’occupation du campus en question… mais les verdicts pleuvent comme les poncifs : « C’est finalement le symbole d’un lieu où on ne se parle plus, alors que ça devrait être, par essence, là où devrait se construire finalement le débat public. » Et l’éditorialiste d’enchaîner face à son invité du jour, Aurélien Pradié (LR) :

Guillaume Daret : Alors qu’est-ce que ça montre, cet exemple et ce blocage ? Pour moi, c’est un exemple supplémentaire qu’aujourd’hui, malheureusement, la nuance n’est plus possible ou extrêmement difficile à trouver. On voit bien qu’aujourd’hui, discuter de l’ampleur de la riposte d’Israël et des moyens qui sont déployés, sans être taxé immédiatement d’antisémitisme, c’est extrêmement compliqué. À l’inverse, demander à boycotter des partenariats avec des écoles israéliennes, c’est ce que demandaient certains de ces bloqueurs, ça n’a pas grand sens aujourd’hui.

Point final. Les deux phénomènes ont beau n’avoir rien en commun et leur comparaison, aucun sens, ils sont tout de même mis sur le même plan : un bel exemple de « nuance ». La revendication de boycott a beau être étayée par les étudiants – quoique laissée totalement hors champ par la rédaction de France Inter –, elle est disqualifiée sans que son détracteur n’en dise de nouveau un seul mot : un bel exemple de pondération.

On l’a bien compris : le propos n’est pas d’informer les auditeurs sur ce que les étudiants disent et font pour éventuellement en « débattre », mais bien de discréditer des « bloqueurs » ayant l’outrecuidance de se mobiliser contre la direction de leur école et contre un génocide en cours. Les propositions réactionnaires étaient donc prédestinées à cadrer l’entretien. Guillaume Daret : « Alors concrètement, pour changer ça [Aurélien Pradié vient de qualifier les actions étudiantes de « forfaitures démocratiques », NDLR], vous faites quoi ? Est-ce qu’il faut par exemple suspendre les aides publiques à certaines de ces écoles, c’est ce que demandent certains dans votre camp ? » L’occasion, pour le député LR, de se répandre en outrances sans qu’aucune d’entre elles ne soit balayée d’un revers de main par les journalistes, et encore moins taxée de n’avoir « pas grand sens ». Pas même lorsque l’élu LR fustige une « minorité qui joue à interdire l’enseignement », avant de se voir accorder le dernier mot de la séquence... singulièrement « nuancée » : « Quand on interdit la transmission de l’histoire et du savoir, c’est le début du totalitarisme. »


Billet humoristique… ou édito ?


C’est un programme tout en « nuance » que nous propose également Sophia Aram dans son billet du lendemain. Ayant régulièrement lancé des appels à l’« équilibre » s’agissant de la situation au Proche-Orient, la boute-en-train profite naturellement de sa chronique pour nous en donner une illustration. « On ne voit pas pourquoi empêcher les cours dans le 7ème arrondissement obligerait Israël à un cessez-le-feu », ironise-t-elle d’emblée, avant de juxtaposer les anathèmes au fil d’un billet forcément « raisonnable » : « une mobilisation en forme de ZAD […] mêlant souvent le grotesque à l’indécence » ; des étudiants qui « jou[ent] les martyrs de la répression policière » ; des « révolutionnaires de salon [qui] troqueront leurs keffiehs pour des habits sages » et « dont le combat pour la Palestine est beaucoup plus récent que celui qu’ils mènent contre l’acné » ; des slogans « beuglés » appelant à « éradiquer l’État d’Israël et les Israéliens du Moyen-Orient »… Toute honte bue, elle va jusqu’à fustiger « l’indécence de leurs bruyantes indignations sélectives, qui rend leur silence au lendemain du pogrom du 7 octobre aussi assourdissant qu’incompréhensible ». Bref : « bêtise, intolérance et intimidation ». Trois mots pour une chronique « équilibrée »… accompagnant la loi du plus fort. Et qui, tel un parfait éditorial, alterne la calomnie, le mensonge et l’invective, du début jusqu’à la fin :

Sophia Aram : Il faut encore trouver un adulte pour leur dire que, contrairement à ce que leur racontent les Insoumis venus s’époumoner sur les braises, le Hamas n’est pas une organisation de résistance, qu’il n’y a pas plus d’apartheid en Israël que de génocide à ce stade à Gaza et qu’à moins d’en programmer un nouveau, aucune solution décente ne passera par l’éradication de l’État d’Israël qui – le découvriront-ils un jour ? – se trouve sur une petite bande de terre, située pile entre la rivière… et la mer.

Rideau.


La matinale dans ses basses œuvres


Même studio, même ambiance dans la matinale du 2 mai. Préfigurant le « grand entretien » à venir, l’éditorialiste Yaël Goosz s’empare de la mobilisation à Sciences Po. Certes, le journaliste s’insurge dès le départ contre la surenchère du gouvernement et de la droite dans le débat public [1]. Et parce que lui aussi se réclame d’un « sens de la mesure » – décidément ! –, il se doit de le mettre en pratique :

Yaël Goosz : Si la cause [des étudiants de Sciences Po] est légitime, la méthode pour l’exprimer peut ne pas l’être. Les opposants à la guerre au Vietnam ne disaient pas que l’État américain devait disparaître [Quelle revendication étudiante le réclame aujourd’hui s’agissant de l’État d’Israël ? On n’en saura rien... et pour cause. NDLR] ! Pourquoi ces mains rouges, symbole ambigu qui renvoie au massacre de deux réservistes israéliens à Ramallah en 2000 [2] ? Enfin, qui est dupe du sillon creusé par les Insoumis dans une campagne qui parle plus de Gaza que d’Europe ? Personne.

Évacuer le fond pour mieux disqualifier la « méthode », recourir à des procès d’intention, disqualifier et diffamer à tour de bras sans le moindre argument : au bingo de « la mesure », France Inter coche définitivement toutes les cases.

Si besoin en était encore, le « Grand entretien du 7/10 » diffusé quelques minutes plus tard à l’antenne est venu le confirmer. D’emblée, il n’est pas inutile de rappeler que France Inter a fait le choix de ne convier aucun étudiant à l’occasion de cette interview. Laquelle, dans l’émission, sera la première (et la dernière) consacrée aux mobilisations étudiantes au cours de cette séquence. Ce jour-là, trois invités sont pourtant réunis autour de Nicolas Demorand : le chef du bureau du New York Times à Paris, Roger Cohen, la sociologue Anne Muxel et le politiste Hugo Micheron. Trois intervenants incarnant une certaine idée du « pluralisme », puisque tous trois se chargent d’instruire plusieurs procès à charge contre les étudiants.

Résumons à gros trait en commençant par Roger Cohen, qui ne cesse de jeter le discrédit sur les étudiants américains, entretenant mécaniquement la suspicion à l’égard de ceux de Sciences Po tant les interventions jonglent entre les uns et les autres comme s’ils constituaient un tout homogène. Réduites à quelques slogans mis dans le même sac dont il est « difficile de ne pas percevoir l’antisémitisme », leurs revendications ne font là encore l’objet d’aucun exposé précis ni objectif au cours de l’entretien. Elles sont en revanche malmenées, déformées et discréditées, parfois au prix de redoutables œillères concernant les résolutions… du droit international. Par exemple :

Roger Cohen : Maintenant, quand on [les étudiants] parle de colonialisme vis-à-vis d’Israël, ce n’est plus le colonialisme qui existe, c’est sûr, dans la Cisjordanie. Non, c’est tout le bébé ! Et c’est le truc entier. C’est la fin de l’État d’Israël. [...] On a un vrai problème hein.

L’animateur n’y trouve rien à redire.

Si la sociologue Anne Muxel occupe initialement un terrain d’apparence plus neutre en s’attardant simplement sur les raisons pour lesquelles il existe un fort « terreau de contestation » à Sciences Po, l’ambiance du studio semble rapidement la mettre à l’aise. Ainsi ne tardera-t-elle à déplorer une « instrumentalisation politique » et à critiquer la « radicalité politique » d’une mobilisation « animée par des minorités d’étudiants qui sont fortement politisés ». L’auditeur se doit d’être effrayé. A fortiori lorsque la sociologue prend le soin d’égrener les automatismes du moment : « extrémisation des mobilisations » ; « difficile de faire entendre des propos plus nuancés » ; « propos antisionistes voire antisémites qui sont portés par certains étudiants ». Le tout au fil d’un argumentaire fort étayé. Par exemple celui-ci :

Anne Muxel : Quand on voit [...] des mots, des slogans... Par exemple je pense au mot « génocide ». On entend « génocide à Gaza ». Mais un génocide… On apprend à nos étudiants qu’un génocide, eh bien, la définition d’un « génocide », ça passe par un certain savoir historique, juridique, euh... c’est très, très, très précis un génocide. Donc on voit bien que, voilà… il y a quand même beaucoup d’étudiants qui ne se reconnaissent pas dans cette extrémisation à laquelle effectivement peuvent conduire certains combats politiques radicaux.

Anne Muxel, qui est sociologue et pas juriste, se permet donc, au nom d’un « savoir historique, juridique », de faire la leçon à tous les juristes internationaux qui interrogent le caractère génocidaire des massacres en cours à Gaza… cherchez l’erreur ! En conclusion de la table ronde, Nicolas Demorand qualifiera ces échanges de « passionnants ». Passionnante fut en effet l’absence de réaction visant à éclaircir de tels propos. Plus passionnant encore fut l’absolu silence de l’animateur au terme de la première intervention de « l’expert » Hugo Micheron :

Hugo Micheron : Ce qui se joue, déjà, à mon sens, de très important, [...] c’est qu’on a une réimportation d’une certaine grille de lecture américaine de ce conflit sur le campus de Sciences Po. Et qui se caractérise notamment par la définition d’un camp du bien qui ferait face à un camp du mal, désigné si vous voulez comme un ennemi et avec assez peu de choses entre les deux, donc assez peu de nuances. Et ça c’est un problème, puisque cette dichotomie entre le camp du bien et le camp du mal, qui était hier portée par Donald Rumsfeld et George Bush aux États-Unis, avant-hier par McCarthy, aujourd’hui est portée par des étudiants qui se classent plutôt à l’extrême gauche, mais qui ne fait pas plus dans la mesure.

Alors que Benjamin Netanyahou invoque dès octobre 2023 la « prophétie d’Isaïe » pour légitimer sa guerre génocidaire, parle d’un combat du « peuple de la lumière » contre le « peuple des ténèbres » et « le mal à l’état pur » ou encore d’une « guerre de civilisation contre le barbarisme », alors que nombre de dirigeants (et journalistes) occidentaux ont endossé cette rhétorique d’une « guerre de civilisation » et enclenché une redoutable répression d’État pour étouffer les voix et les actions de celles et ceux qui ne se laissent pas berner par cette mystification politico-historique, c’est aux portes de Sciences Po qu’Hugo Micheron entrevoit la continuation historique du maccarthysme. Vous avez dit misère ?

Sans borne, la complaisance de Nicolas Demorand conduira à d’autres types d’« échanges passionnants ». Ce moment, notamment, où Hugo Micheron verse dans le complotisme autorisé en pointant à Sciences Po des « groupes très structurés idéologiquement qui exploitent l’indignation légitime autour d’une guerre assez effroyable pour faire passer des arguments auprès d’un public beaucoup plus large », sans pour autant jamais répondre à la question somme toute logique de l’animateur : « Quels sont ces groupes ? » Lequel n’insistera pas après avoir fait chou blanc.

Passionnant, pour conclure, fut ce long échange à deux voix entretenant la calomnie :

- Nicolas Demorand : Parmi les slogans des étudiants, certains remettent directement en cause Sciences Po, sur le mode « Israël assassin, Sciences Po complice ». On a pu voir également ces images d’étudiants brandissant leurs mains peintes en rouge sang. Images qui ont choqué car elles rappellent celles du lynchage de deux réservistes israéliens à Ramallah en octobre 2000. Ces images, comment vous les avez reçues ?

- Hugo Micheron : C’est très important de revenir là-dessus [...]. Premier élément, déjà, Sciences Po, je pense que tout le monde pourrait être d’accord avec ça, n’est pas complice de la guerre à Gaza. […] C’est factuel : […] c’est une aberration. Le deuxième élément qui est beaucoup plus choquant, c’est cet épisode des mains rouges [...], qui, en fait, fait directement référence à, en 2000, ce qui s’est passé à Ramallah quand deux Israéliens avaient été tabassés à mort [...]. Donc si vous voulez, ce geste, qui mimique, qui fait une référence directe à cet acte, qu’on retrouve dans les rues de Sciences Po aujourd’hui, c’est une glorification indirecte du meurtre de deux Israéliens, et on le voit bien, le sous-texte, c’est « mort aux Juifs ». Qu’on le veuille ou non, c’est ça qui apparaît de façon subliminale.

- Nicolas Demorand : Même si les étudiants disent : « Nous ne connaissions pas cette affaire, ni l’image de 2000 » ?

- Hugo Micheron : Bah voilà ! C’est là où le prof [...] qui est en moi intervient. C’est que si les étudiants de Sciences Po où, justement, on est dans le lieu où le débat doit s’élever, ce lieu nous oblige, si les étudiants ne connaissent pas les références des gestes militants qu’ils emploient, bah moi j’ai un problème sur le fond intellectuel [...]. On ne peut pas prétendre ignorer les symboles auxquels on se réfère.

France Inter ou Franc-Tireur ? Médiatisé à une échelle de masse, cet épisode des « mains rouges » est en tout cas traité à l’identique.

À notre connaissance, ce « grand entretien » n’aura fait l’objet d’aucun retour critique à l’antenne. Pourtant, nombreux sont les auditeurs à avoir étrillé son dispositif et son contenu, ainsi qu’on peut le lire sur le site… de Radio France, à la page de « la médiatrice ». Des messages qui auraient sans doute mérité une intervention publique… de la médiatrice, tant la quasi-totalité d’entre eux déplorent les « amalgames, [les] poncifs, [et les] idées reçues » ayant eu cours dans l’émission, dénoncent « un choix d’invités […] unanime et l’absence d’étudiants dans ce "débat" » et soulignent en outre « le fait qu’aucun auditeur n’a été invité à l’antenne pour réagir à cette discussion unilatérale ou obtenir l’opportunité de la nuancer. »


***


Au fil de cette séquence de mobilisations étudiantes, c’est peu dire que France Inter aura brillé. De cadrages imposés en pratiques professionnelles routinisées, les rédactions auront montré ce qu’un média pourtant largement consacré dans le champ journalistique sait faire de pire. Éditorialiser à sens unique ; asservir son agenda à celui des institutions ; focaliser l’attention sur la forme des mobilisations et polariser les cadrages sur ses « à-côtés » ; accorder le monopole de la parole aux intervenants « dominants » ; ignorer superbement les premiers concernés ; invisibiliser leurs revendications ; amplifier l’écho des emballements politiques en mettant en scène les déclarations d’élus, de préférence outrancières ; saturer l’agenda de « polémiques » savamment montées en épingle, entretenant pour certaines des « scoops » fondés sur des fake news. Le tout pour un seul résultat : défigurer un mouvement social et participer activement au maintien de l’ordre.


Pauline Perrenot

 
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France Inter, Sciences Po et la Palestine : marginaliser les étudiants, invisibiliser les revendications (2/3)


by: Pauline Perrenot

France Inter, Sciences Po et la Palestine : marginaliser les étudiants, invisibiliser les revendications (2/3)

par Pauline Perrenot,

Dans ce deuxième volet, nous poursuivons la critique du traitement, par France Inter, des mobilisations à Sciences Po en soutien de la Palestine. Comment les pratiques ordinaires du journalisme contribuent-elles à la production d’une information mutilée ? Comment une rédaction en arrive-t-elle à défigurer et à délégitimer un mouvement social ? Exacerbés à travers la couverture de la « polémique » médiatico-politique autour de l’occupation d’un amphithéâtre à la mi-mars, les biais que nous pointions dans le premier article se sont prolongés au printemps, alors que les mobilisations étudiantes ont pris de l’ampleur.

Effectuée à partir des données et des notices de l’INA compilées entre le 1er novembre 2023 et le 1er juin 2024, notre étude met en lumière une couverture médiatique particulièrement fournie au printemps 2024. S’étalant du 25 avril au 8 mai 2024, la séquence concentre près de 85% des contenus (49).



Une médiatisation en partie décorrélée de la mobilisation


C’est en effet à partir du 25 avril que Sciences Po revient à l’antenne de France Inter, avec une simple brève focalisée sur l’opération policière ayant conduit à l’évacuation du campus occupé par des étudiants. Depuis ladite « polémique » de la mi-mars (soit plus d’un mois), aucun sujet spécifique relatif à la mobilisation en soutien du peuple palestinien n’est recensé à l’antenne par l’INA [1]. On n’en trouve d’ailleurs aucune trace non plus entre le 1er novembre 2023 et le 13 mars 2024.



C’est un premier biais… et il est de taille : on constate ainsi qu’à l’antenne de France Inter, la médiatisation est en grande partie décorrélée de la mobilisation elle-même, indexée non pas sur l’agenda des étudiants, mais sur celui d’acteurs tiers qui interviennent sur le cours de la mobilisation en question, qu’il s’agisse ici de la police ou, comme à la mi-mars, de personnalités politiques. Au cours de ce long mois, comme des précédents depuis novembre 2023, le comité Palestine de Sciences Po Paris – pilier de la mobilisation, créé peu de temps après le 7 octobre et réunissant « 300 à 400 étudiants » selon Le Monde – a pourtant entrepris des actions et avancé des revendications [2]. Non qu’il ne se passait « rien » : il ne se passait rien que la rédaction de France Inter juge digne d’une information.

Une chronologie journalistique qui dessine, en creux, l’influence asymétrique exercée par les différents acteurs d’un conflit auprès des rédactions, proportionnée au poids symbolique qu’ils occupent plus largement dans le rapport de forces politique et idéologique. L’attention, l’intérêt et la légitimité accordés par la rédaction de France Inter aux sources institutionnelles conduisent à ce qu’une opération de police, le déplacement d’une personnalité politique ou une simple déclaration de ministre soient perçus comme ayant suffisamment de valeur pour être portés à l’antenne et, de fait, construits comme le point de départ d’une médiatisation qui n’existait pas auparavant.

A contrario, bien qu’il se dote de moyens de communication autonomes, le comité Palestine de Sciences Po ne jouit pas du même crédit que ceux qu’il a le mauvais goût de critiquer. Et ce, alors que cette prestigieuse école parisienne a l’avantage d’être sous les radars des rédactions… parisiennes, bien plus que nombre d’universités en France [3]. En témoigne d’ailleurs la couverture relativement importante de cette deuxième séquence de mobilisation par une radio nationale, qui tranche avec le silence assourdissant accompagnant tant d’autres manifestations en soutien au peuple palestinien, au sein d’autres établissements d’enseignement, mais plus encore, au sein du mouvement social partout en France.

Reste que, couplé aux exigences de rapidité et au mimétisme présidant à la fabrique de l’information, ce déséquilibre des sources influe mécaniquement sur le contenu de l’information produite. Ainsi, le 25 avril, une simple brève de 11 secondes est délivrée dans le journal de 13h :

En écho à ce qui se passe dans les grandes universités américaines, qui dénoncent le sort des Palestiniens de Gaza, un site du campus de Sciences Po Paris a dû être évacué hier soir. Il était occupé par une soixantaine de militants propalestiniens.

Ici, c’est bien l’action de la police – naturalisée de surcroît, c’est à dire présentée comme si elle relevait d’une sorte de fatalité – qui appelle la médiatisation. De l’occupation des étudiants de Sciences Po, on ne sait toujours rien à proprement parler, en dehors du fait que ces derniers sont désormais qualifiés de « militants » et catégorisés sous l’étiquette « propalestinien », laquelle est utilisée dans la quasi-totalité des contenus du corpus. Une appellation réductrice et bien peu signifiante, pour ne pas dire entachée de discrédit au regard de ses usages dans le discours médiatico-politique dominant.

On remarque en outre que bien qu’aucun détail ne concerne l’occupation, la rédaction de France Inter dresse un parallèle – présenté comme évident – avec les mobilisations des campus américains, ayant fait quant à eux l’objet d’un développement au cours du journal de 13h. Un cadre interprétatif de l’objet « mobilisation Sciences Po » – réplique de la « mobilisation US » – est donc donné sans que cet objet n’ait encore jamais été étudié ni même présenté aux auditeurs... L’art de mettre la charrue avant les bœufs ?


L’art du « cadrage », ou comment rater le cœur de cible


C’est en tout cas la conclusion à laquelle nous conduit l’étude des contenus produits le lendemain (26/04). Dans les journaux de 6h et 7h, deux brèves reconduisent ainsi en grande partie le même cadrage. La première mentionne une intervention de la police contre un mouvement « en écho aux mobilisations sur les campus américains » et la seconde, une nouvelle occupation réalisée « dans le sillage des actions menées dans des universités américaines », « alors qu’aux États-Unis, le mouvement de protestation contre la guerre à Gaza se généralise, de Los Angeles à Atlanta, d’Austin à Boston, [et que] le mouvement d’étudiants américains propalestiniens grossit d’heure en heure. »

Puis, au 13h, après un sujet sur les mobilisations de Columbia, la rédaction embraye immédiatement :

Et en France, le siège de Sciences Po Paris a de nouveau été investi cette nuit par une cinquantaine d’étudiants propalestiniens. L’occupation se poursuit dans le bâtiment historique de l’école, soutenue par une manifestation rue Saint-Guillaume avec keffiehs et drapeaux palestiniens. Bonjour Sonia [P.], pourquoi ce mouvement prend-il particulièrement à Sciences Po Paris ?

La question posée par le présentateur à la « journaliste-reporter » dit tout du cadrage préalablement établi par la rédaction. Celui-ci ne porte (toujours) pas sur les motivations des étudiants, mais sur les facteurs qui pourraient expliquer la « propagation » de la mobilisation au sein de la grande école parisienne. Si, pour la première fois, deux témoignages d’étudiantes sont donnés à entendre, aucun ne porte sur les revendications ni ne donne d’explication quelconque sur le fond du mouvement. Ils illustrent en revanche la problématique ce que la rédaction de France Inter était venue chercher : la preuve que ce mouvement vient d’une manière ou d’une autre de l’étranger. La première étudiante mentionne ainsi la présence de « davantage d’étudiants internationaux à Sciences Po que dans d’autres universités » et la seconde évoque le parcours d’une étudiante très impliquée dans le comité Palestine, inscrite dans un double cursus franco-américain (entre Sciences Po et l’université de Columbia). Disserter et spéculer avant d’avoir… informé : une pratique du journalisme « à front renversé », qui n’a pas l’air de déranger la rédaction de France Inter, mais coïncide opportunément avec… le cadrage du gouvernement : « Gabriel Attal a dénoncé ce matin […] une minorité qui "veut imposer l’idéologie venue d’outre-Atlantique" », peut-on par exemple entendre dans le journal de 19h, le 27 avril.

Il faut ainsi attendre cinq jours [4] après le début de la séquence pour qu’un contenu laisse une place un tant soit peu prépondérante aux étudiants concernant leurs propres motivations (30/04) et deux jours supplémentaires pour qu’un premier sujet soit anglé sur une partie de leurs revendications (3/05). Les autres cadrages principaux s’articulent autour de l’influence des campus américains, on l’a vu (26/04, journal de 13h) ; de l’ampleur réelle des mobilisations au sein des universités françaises (29/04, journal de 19h) ; du peu de soutien accordé par la communauté enseignante de Sciences Po aux étudiants mobilisés (30/04, journal de 8h) ; de l’intervention de la ministre de l’Enseignement supérieur revendiquant un double principe de « neutralité » et de « pluralité » au sein des universités (2/05, journal de 13h) ; de la façon dont les jeunes mobilisés concilient les études et le militantisme (3/05, journal de 7h) ; de la perception du mouvement étudiant en Israël (2/05, journal de 19h et 3/05, journal de 18h) ou encore, de la répression policière (3/05, journal de 13h).


Revendications : l’information parcellaire


Le 30 avril, au journal de 19h, des détails factuels sont apportés sur les occupations dans les universités françaises. Le sujet est même à la Une, mais il fait l’objet d’un panorama presque exclusivement descriptif. Cinq étudiants sont ainsi conviés à donner leurs impressions… plus qu’à exposer ce qu’ils réclament. D’une durée de 38 secondes en cumulé, ces témoignages donnent à entendre une « solidarité », décrivent une mobilisation menée par « humanisme » et destinée à « faire entendre la parole palestinienne », avant de fournir quelques détails pratiques sur les lieux des manifestations.

La roue tourne-t-elle le 2 mai ? Dans le journal de 19h, les occupations font à nouveau la Une et, compte tenu de la question posée par la journaliste – « Que disent les étudiants mobilisés pour Gaza sur les campus aux États-Unis et en France ? » –, on s’attend en effet à ce que les revendications soient largement exposées. Peine perdue puisqu’à sa propre question, la journaliste choisit de répondre d’une manière pour le moins… inattendue : « Le président israélien y entend de l’antisémitisme, là où Sciences Po, ce matin, à Paris, a essayé de débattre. » C’est alors un sens particulièrement clairvoyant de la hiérarchie de l’information que donne à voir France Inter, puisque les auditeurs devront en passer, d’abord, par le « message aux Israéliens expatriés » du président Isaac Herzog à propos des « slogans qui le heurtent » au sein des manifestations étudiantes américaines et françaises ; puis dans un deuxième temps, par la communication de la ministre de l’Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, qui « réclame aux présidents d’universités de maintenir l’ordre ». Ceci pour en arriver, seulement dans un troisième et dernier temps donc, au débat – présenté comme « apaisé » – ayant eu lieu à Sciences Po le matin même entre étudiants, salariés et professeurs, qui s’est tenu « à huis clos » avec « près de 350 participants ». L’occasion d’entendre trois étudiants… pendant seulement 32 secondes en cumulé, alors qu’à titre de comparaison, le message du président israélien est diffusé pendant 1 minute et 10 secondes en continu. Autant dire que ce temps extrêmement contraint n’autorise que peu d’informations sur les revendications en tant que telles, abordées dans les (très) grandes lignes, uniquement concernant « la question sensible des partenariats entre Sciences Po et quatre universités israéliennes » (dixit le reporter) et vis-à-vis desquels une étudiante interrogée réclame la création d’une « commission d’enquête dans Sciences Po » [5]. Basta. Au total, le reportage dure 1 minute et 22 secondes et sera dupliqué dans l’édition de 23h, avec les mêmes témoignages d’étudiants.

Le lendemain (3/05), dans la seconde partie du journal de 13h, la rédaction de France Inter semble enfin se décider à délaisser les à-côtés... pour se concentrer prioritairement sur le discours des étudiants. Jérôme Cadet :

Alors quand on leur demande pourquoi ils se mobilisent, nombre de ces étudiants expliquent qu’il faut, je cite, « arrêter le génocide » que commettrait l’armée israélienne à Gaza. Je donne la définition que fait le Larousse d’un génocide. « Crime contre l’humanité tendant à la destruction partielle ou totale d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux », fin de citation. Bonjour Éric [D.], on va voir ce qu’en dit maintenant la justice.

Si l’exposé juridique du journaliste est autrement plus informatif et concluant [6] que la présentation « Larousse » du présentateur, le compte n’y est toujours pas : la parole étudiante a beau déclencher un (court) focus de la rédaction sur la qualification de « génocide », les revendications ne font toujours pas l’objet d’un sujet à part entière.

Un contre-exemple bien relatif voit le jour le lendemain (4/05). Alors que le journal de 7h réitère l’appel de la ministre de l’Enseignement supérieur au « maintien de l’ordre », la rédaction diffuse un reportage sur le campus de Sciences Po à Poitiers, également occupé. Trois étudiants sont interrogés et pour la première fois, les extraits diffusés font tous état de revendications. Si les témoignages mis bout à bout ne durent que 37 secondes, le sujet porte véritablement sur la mobilisation elle-même et partie des messages qu’entendent porter les étudiants. Fait cocasse, ou plutôt révélateur : le reportage n’est pas signé d’un journaliste de France Inter, mais d’une consœur de la rédaction de France Bleu Poitou, rediffusé à l’antenne de la radio nationale [7]... L’occasion de souligner le caractère parisiano-centré de l’information délivrée par France Inter. Si plusieurs villes concernées par des universités en lutte sont mentionnées à l’antenne (Lille, Le Havre, Grenoble, Dijon, Poitiers, Reims, Saint-Étienne et Lyon), l’information s’apparente davantage à du « name dropping » : en dehors du reportage de France Bleu Poitou et d’un autre focus sur un lycée international de Lille, aucun sujet ne s’attarde réellement sur les universités et les campus de Sciences Po en « province ».

Mais revenons-en aux revendications. Certes, dans les jours ayant précédé les sujets abordés en amont (2, 3 et 4/05), la rédaction de France Inter n’a pas totalement passé les demandes étudiantes sous silence. Elle s’est contentée d’en rapporter une infime partie, soit au travers de brèves – des contenus d’une durée inférieure à 40 secondes –, soit de manière totalement périphérique, au détour d’une interview ou entre deux virgules d’un sujet axé sur une autre information.

Le 27 avril, trois brèves respectivement diffusées dans les journaux de 6h30, 7h et 8h en font par exemple partiellement état. L’information majeure étant la levée du blocage de Sciences Po, la rédaction se sent tout de même tenue... de dire un mot du pourquoi ! A posteriori, on apprend donc par la voix de la journaliste que les étudiants « réclamaient de leur direction des prises de position plus claires sur l’action israélienne dans Gaza et l’arrêt des partenariats avec les universités de l’État hébreu » (27/04, journal de 6h30). C’est tout ? C’est tout. Les deux journaux suivants portent quant à eux sur les engagements pris par la direction, laissant entrevoir, mais seulement en creux, l’existence d’autres revendications étudiantes : « [La direction] s’engage à organiser un débat interne, notamment sur les partenariats avec des universités israéliennes, et elle suspend les procédures disciplinaires lancées contre des étudiants participant à ce mouvement. » (27/04, journal de 7h). Mais de ces procédures, comme des motifs pour lesquelles les étudiants s’en indignent, on ne saura strictement rien.

Il en va de la sorte dans la totalité des contenus étudiés : l’exposé des revendications est au mieux parcellaire, au pire, inexistant. Le format y est pour beaucoup : au cours de la deuxième séquence, les brèves sont majoritaires, suivies par les sujets de journaux, dont la durée excède rarement 2 minutes et 30 secondes…




Ainsi, que dire d’une « information » qui se contente de mentionner, au cours d’une brève de 25 secondes, la demande d’« arrêt des partenariats avec les universités de l’État hébreu », sans dire un mot des partenariats en question, de leur nature et des raisons pour lesquelles les étudiants en font une question politique en réclamant leur suspension ? À notre connaissance, France Inter n’aura pas consacré le moindre temps d’antenne à creuser le sujet. Il en va de même s’agissant de l’exigence de « prises de position plus claires [de la direction de Sciences Po] sur l’action israélienne dans Gaza ». Quelles étaient ces positions jusqu’à présent ? Comment se sont-elles manifestées ? Et, partant, pourquoi ne pas dire un seul mot du phénomène pourtant central que dénoncent les étudiants sur cette affaire et qui motive précisément cette revendication : un deux poids, deux mesures manifeste au regard des déclarations et des actions prises par la direction de Sciences Po au lendemain du 7 octobre 2023 ? Autant de questions qui restent naturellement en suspens compte tenu... du déficit d’information.


Les intervenants « légitimes »... et les étudiants


C’est que le bilan est particulièrement accablant pour une radio nationale : au terme de cette séquence (25 avril - 8 mai), soit deux semaines d’occupations, de manifestations, de discussions avec la direction, d’évacuations et de blocages successifs à Sciences Po Paris et ailleurs en France, aucun temps éditorial conséquent n’est consacré à ce que ces étudiants font, disent et réclament. Un énième symptôme édifiant ? Les « comités Palestine » au sein desquels ils se sont regroupés sont à peine mentionnés à l’antenne et ne font jamais l’objet d’un reportage à part entière [8]… Et comme on a commencé à le percevoir, le peu que l’on sait provient très rarement de la bouche des étudiants eux-mêmes.

À cet égard, analyser la répartition de la parole sur l’ensemble de la séquence nous renseigne beaucoup sur la manière dont la rédaction conçoit, construit et hiérarchise l’information qu’elle délivre aux auditeurs. Au total sur notre corpus, entre le 25 avril et le 8 mai, 22 étudiants ont témoigné à l’antenne de France Inter – issus de différents campus de Sciences Po dans leur immense majorité [9]. L’ensemble de ces prises de parole sont diffusées dans les journaux d’information (13 sont concernés sur les 21 journaux du corpus) et intégrées à ce qu’on appelle des « enrobés », c’est à dire un reportage écrit par un journaliste, auquel il mêle donc sa voix à celle d’un (ou de plusieurs) interlocuteur. Les étudiants ne disposent donc d’aucune parole autonome, ni ne bénéficient du cadre privilégié (et médiatiquement plus exposé) que confère par exemple l’interview classique, un genre journalistique qui demeure la chasse gardée d’intervenants « dominants ».

La preuve au cours de cette séquence. Quatre interviews ont été consacrées pour tout ou partie aux mobilisations étudiantes à Sciences Po. Les heureux élus occupent tous des positions sociales et professionnelles prestigieuses. Deux d’entre eux sont des personnalités politiques : la ministre Nicole Belloubet et le député LR Aurélien Pradié. Une troisième est dirigeante syndicale : Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT [10]. Quant à la dernière interview (« Grand entretien du 7/10 », 2/05), elle s’est faite sous la forme d’une table ronde ayant réuni trois invités : Hugo Micheron (enseignant-chercheur en science politique rattaché au CERI et maître de conférences à Sciences Po), Anne Muxel (sociologue, directrice de recherche au Cevipof) et Roger Cohen (chef du bureau du New York Times à Paris).

Entre ces interviewés et les 22 étudiants mentionnés plus haut, les conditions d’expression sont donc totalement inégalitaires. Les temps de parole s’en font mécaniquement ressentir. Dans les reportages des journaux, aucun étudiant ne s’exprime plus de 58 secondes en continu (voir en annexe) [11]. Cumulé, leur temps de parole s’élève à 7 minutes et 41 secondes, soit 9 % de la durée totale des contenus consacrés aux mobilisations étudiantes – près de 20 % si on le rapporte à la durée des sujets et des brèves dédiés dans les journaux d’information [12].

À titre indicatif, le temps de parole cumulé de 22 étudiants aura donc à peine excédé celui dont aura bénéficié Aurélien Pradié, à lui seul, au cours de l’émission « Questions politiques » (6 minutes 30). Nicole Belloubet s’exprime quant à elle 2 minutes et 26 secondes sur le sujet, comme Marylise Léon, et la table ronde spécifique du « Grand entretien du 7/10 » – « Mobilisation propalestinienne dans les universités » (2/05) – dure environ 25 minutes. Il faut ajouter à cela les nombreux propos rapportés des ministres Sylvie Retailleau et Gabriel Attal, notamment, au cours des journaux d’information, qui contribuent également à cadrer l’information. Le 27 avril par exemple, les journalistes choisissent de consacrer une brève au fait que « Gabriel Attal a dénoncé ce matin "des dérives d’une minorité agissante et dangereuse" ». Aucun contradictoire n’étant apporté, la rédaction endosse le rôle de vulgaire porte-voix, à l’instar du 28 avril :

Sciences Po Paris, marqué par des occupations et des blocages ces derniers jours avant l’accord trouvé vendredi soir avec la direction. Hier, Gabriel Attal a déploré un « spectacle navrant et choquant ». Le Premier ministre affirme qu’« il n’y aura jamais de droit de blocage, jamais de tolérance avec l’action d’une minorité agissante et dangereuse. »

Fin de l’histoire… et ainsi de suite.


***


L’information au rabais : tel aurait pu être le titre de ce deuxième volet. De la marginalisation des revendications à la relégation des étudiants au second plan, en passant par l’invisibilisation totale de l’organisation collective des « comités Palestine » ou encore le suivisme à l’égard de l’agenda du pouvoir politique ou de la police, l’étude exhaustive des contenus produits par France Inter permet de poser un diagnostic classique par temps de manifestation : les pratiques ordinaires du journalisme, alliées aux choix éditoriaux et aux cadrages édictés par les directions éditoriales, contribuent à totalement défigurer un mouvement social. Et ce, malgré un suivi relativement appuyé, à l’antenne, des mobilisations étudiantes à Sciences Po. Le panorama ne serait complet sans qu’on y intègre les contenus diffusés en dehors des journaux d’information : interviews, éditos et billets humoristiques. Lesquels, hélas, noircissent encore davantage le tableau. À suivre…


Pauline Perrenot


Annexe – La parole étudiante à l’antenne de France Inter (25 avril – 8 mai 2024)


 
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Bernard Arnault, Palestine, audiovisuel public et compagnie : revue de presse de la semaine


by: Elvis Bruneaux

Bernard Arnault, Palestine, audiovisuel public et compagnie : revue de presse de la semaine

par Elvis Bruneaux,

Critique des médias : une revue de presse hebdomadaire. Si ce n’est exhaustive, au moins indicative [1]. Au programme : du 15/11/2024 au 21/11/2024.


Critique des médias


« France Inter, Sciences Po et la Palestine : quand la "polémique" supplante l’information », Acrimed, 20/11.

« Les médias à l’épreuve de la guerre à Gaza », blog, 18/11.

« Jérusalem-Est : quand une info (officielle) tombe dans l’oubli », Arrêt sur images, 18/11.

« France-Israël, "dans un contexte que nous connaissons tous" », Arrêt sur images, 16/11.

« Anis, 15 ans, tué à Poitiers : cas d’école des jeunes vus par les médias », Arrêt sur images, 17/11.

« "Tu es une grosse poubelle" : Hanouna lance, les médias suivent », Arrêt sur images, 15/11.

« Procès Pierre Palmade : après l’emballement, le cirque médiatique s’installe au tribunal de Melun », Libération, 20/11.

« Accident de Pierre Palmade : retour sur un crash médiatique », Mediapart, 19/11.

« Palmade : complotisme ordinaire sur CNews », Arrêt sur images, 21/11.

« Cher Michel Onfray », Blast, 16/11.

« Mercure dans le thon : problème sanitaire ou panique médiatique ? », Arrêt sur images, 15/11.

« Enfin "vus à la télé" : les "faux documents" de Bardella », Arrêt sur images, 19/11.

« Dans les médias, la diversité peine à exister », Libération, 18/11.

« Gilets jaunes : quand les grands médias méprisaient le peuple », Off Investigation, 17/11.

« "Feux de la colère" : les médias aiment soudain que ça brûle », Arrêt sur images, 20/11.

« Quand la presse de Bernard Arnault encense Gabriel Attal », Off Investigation, 19/11.

« "Bergé, grosse poubelle" Hanouna, Apathie, Cnews : ils ont encore menti pour taper sur les insoumis », Le Média, 20/11.


Économie des médias


« L’Assemblée nationale sanctuarise le financement de l’audiovisuel public et sécurise son indépendance financière », Mediapart, 20/11.

« Comment Bernard Arnault ventile ses publicités dans les journaux », L’Informé, 15/11.

« Le presse sous perfusion de LVMH et de Bernard Arnault », Acrimed, 19/11.

« Cure d’austérité en vue dans le groupe les Échos - Le Parisien », L’Informé, 18/11.

« ESJ : les milliardaires français rachètent la plus vieille école de journalisme », L’Humanité, 18/11.

« Le média "60 millions de consommateurs" mis en vente par le gouvernement », Libération, 19/11.

« Déficitaire depuis dix ans, L’Express revient à l’équilibre et prévoit de lancer L’Express Europe en 2025 », Le Figaro, 20/11.

« Vivendi : la très relative indépendance des futurs administrateurs de l’empire Bolloré », La Lettre, 21/11.


À signaler, aussi


« L’Arcom a pris 52 sanctions contre les chaînes C8 et CNews en douze ans, dont 16 pendant la seule année 2024 », Le Monde, 15/11.

« Le député Aurélien Saintoul relance l’Arcom pour qu’elle accélère sa procédure contre CNews », La Lettre, 15/11.

« Bolloré va-t-il écraser l’Arcom ? », Sleeping Giants, 16/11.

« Ouin-ouin au pays d’Hanouna », Les Jours, 15/11.

« Violences en prison : les magistrats se penchent sur la censure d’un journal libertaire », Mediapart, 15/11.

« La short list des candidats à la présidence de Public Sénat », La Lettre, 21/11.

« Quand les journalistes adoptent les codes des influenceuses », La Revue des médias, 20/11.

« Affaire Manu Levy : NRJ condamnée pour harcèlement moral », Libération, 15/11.

« Quand la radio finançait la reconstruction d’un village normand », Arrêt sur images, 16/11.

« "Sud Ouest" suspend à son tour sa présence sur le réseau social X, après "Ouest-France" », Libération, 21/11.

« Israël : RSF dénonce l’offensive du gouvernement de Benyamin Netanyahou contre l’indépendance des médias », RSF, 21/11.


Et aussi, dans le monde : Iran, Chine, Hong Kong, Grèce, Guatemala...


Retrouver toutes les revues de presse ici.

 
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France Inter, Sciences Po et la Palestine : quand la « polémique » supplante l'information (1/3)


by: Pauline Perrenot

France Inter, Sciences Po et la Palestine : quand la « polémique » supplante l’information (1/3)

par Pauline Perrenot,

Entre les mois de mars et mai 2024, le traitement dominant qu’ont réservé les grands médias aux mobilisations étudiantes en soutien à la Palestine, notamment à Sciences Po, s’est inscrit dans un périmètre pour le moins restreint, relevant davantage du procès à charge que de l’information. Un focus sur la couverture réalisée à cette époque par France Inter permet de mettre en lumière les mécanismes et les pratiques traditionnels par lesquels les médias en arrivent à défigurer un mouvement social. Et ce, sans avoir nécessairement besoin de recourir aux formats consacrés du « parti pris ». Dans ce premier volet, nous nous intéressons à la séquence d’emballement politico-médiatique survenue à la mi-mars.

À partir des données et des notices de l’INA compilées entre le 1er novembre 2023 et le 1er juin 2024, nous avons recensé 58 contenus produits par France Inter à propos des mobilisations à Sciences Po en soutien au peuple palestinien (voir en annexe pour un point méthodologique). Deux séquences se dégagent. Une première, extrêmement brève, date de la mi-mars. La seconde, s’étalant du 25 avril au 8 mai 2024, est de loin la plus fournie puisqu’elle concentre près de 85% des contenus (49). Elle est, aussi, celle qui a retenu prioritairement notre attention.



Au préalable toutefois, les contenus produits à la mi-mars méritent qu’on s’y arrête, tant ils offrent un condensé édifiant des biais qui émaillent la couverture de la deuxième séquence.


L’hégémonie des sources « légitimes »


Au journal de 19h, le 13 mars, une information relative à Sciences Po fait l’objet d’un coup de projecteur, dès l’annonce des titres :

Hélène Fily : Le gouvernement va saisir la justice après la mobilisation propalestinienne d’hier à Sciences Po interdisant la présence d’étudiants juifs. Gabriel Attal, le Premier ministre, l’a annoncé en se rendant sur place ce soir.

Tonitruante, cette accroche appelle au moins deux remarques. D’une part, on comprend d’emblée que la mobilisation étudiante n’est pas une information en tant que telle, mais un élément de contexte périphérique rapporté pour les besoins du sujet numéro 1 – l’annonce de Gabriel Attal. On constate, d’autre part, l’absence totale de précaution de la rédaction de France Inter : s’affranchissant de tout conditionnel, la journaliste présente un acte de discrimination envers des étudiants juifs (au pluriel) comme un fait avéré. Largement démenti depuis [1], cet épisode a fait l’objet d’un emballement politico-médiatique inconsidéré, initialement déclenché par l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) avant d’être propulsé sur le devant de la scène par la direction de Sciences Po et surtout, par le pouvoir politique – avec en chefs de file, le Premier ministre Gabriel Attal, la ministre de l’Enseignement supérieur Sylvie Retailleau et le président de la République lui-même [2].

France Inter aura donc apporté sa pierre à l’édifice. La confiance aveugle accordée aux sources institutionnelles conduit en effet la première radio de France à emboîter le pas au pouvoir politique, dont elle se fait la caisse de résonance. C’est ainsi qu’après les gros titres, les mêmes biais se prolongent dans le reportage. « La polémique prend de l’ampleur », annonce d’emblée Claire Servajean, avant de laisser Hélène Fily dérouler son sujet :

Une centaine d’étudiants propalestiniens qui ont occupé l’amphithéâtre principal de la grande école, empêché la tenue d’un cours magistral et l’entrée d’une étudiante de l’Union des étudiants juifs de France [notons que « d’étudiants juifs » au pluriel, on passe désormais à « une étudiante », NDLR]. Elle dit avoir été traitée de « sioniste » et Emmanuel Macron dénonce des propos « parfaitement intolérables ». Bonsoir Marie [M.]. Et le Premier ministre s’est donc rendu sur place ce soir.

S’ensuit un court sujet d’une minute, qui ne consiste ni plus ni moins qu’en un duplicata du « coup de semonce » – également qualifié de « démonstration de fermeté » – de Gabriel Attal, en visite éclair au Conseil d’administration de Sciences Po dans l’après-midi. Ses propos fustigeant notamment « une forme de pente, de dérive […] liée à une minorité agissante et dangereuse à Sciences Po » ont été rapportés un peu plus tôt par une dépêche AFP, reprise partout dans la presse. Ils sont transcrits tels quels par la journaliste de France Inter et fournissent, de fait, l’angle traité sur la radio publique.


L’information est un rapport de forces


À sens et source uniques, ce cadrage sera partiellement rectifié le lendemain. Mais comme toujours, le mal est fait à l’instant T. S’emballer d’abord, vérifier ensuite : tel semble être le précepte de rédactions abreuvées au modèle de « l’info en continu » et de la course au scoop.

Le retentissement de la « controverse » est d’ailleurs encore mis en scène dans les journaux d’information du lendemain matin. « Sciences Po Paris en pleine polémique sur un rassemblement propalestinien », annonce-t-on à 6h ; « C’est la suite de la polémique sur une mobilisation propalestinienne », renchérit la rédaction à 7h, ou encore, à 8h : « L’affaire est montée jusqu’au sommet de l’État, provoquant l’indignation d’Emmanuel Macron en conseil des ministres. »

Néanmoins, contrairement à la veille, ces trois journaux font état de zones d’ombre et témoignent d’une information sous tension entre, d’une part, la communication appuyée du pouvoir politique et de la direction de Sciences Po, et, d’autre part, la version des étudiants mobilisés. Péniblement, cette dernière se fraye pour la première fois un chemin à l’antenne, où elle demeure toutefois largement sous-estimée, ensevelie sous le poids des sources « légitimes ». Ainsi de cette brève au journal de 6h :

Une ligne rouge a été franchie, estime la ministre de l’Enseignement supérieur. Sylvie Retailleau annonce des poursuites disciplinaires contre deux étudiants ayant interdit l’accès à l’amphithéâtre à une autre étudiante parce qu’elle était juive, selon l’Union des étudiants juifs de France, ce que contestent les organisateurs du rassemblement.

Point final. Une heure plus tard, le journal de 7h avance de quelques pas supplémentaires, mais le déséquilibre dans la présentation des dites « versions » reste inchangé :

Une étudiante juive empêchée d’assister à la conférence. Les organisateurs disent que ce n’est pas en raison de sa religion, mais parce qu’ils voulaient l’empêcher de filmer à l’intérieur. La version des faits n’est pas très claire. Qu’importe pour la ministre de l’Enseignement supérieur Sylvie Retailleau, il faut un message de fermeté. [Extrait d’une interview de Sylvie Retailleau.]

Et qu’importe pour la rédaction de France Inter, qui s’empresse de relayer le message en question. Les journalistes ont beau nager dans un grand flou artistique, ils font le choix d’alimenter et d’amplifier la « polémique » plutôt que de tempérer en prenant le temps… d’enquêter. Ils ont beau, à demi-mot, mettre en doute l’emballement du gouvernement, ils lui tendent le micro.

Ce n’est qu’au journal de 13h, le 14 mars toujours, que le présentateur introduit un reportage en posant les questions qui auraient dû guider la rédaction dès le départ : « Des propos antisémites ont-ils été tenus à Sciences Po Paris ? » ou bien encore : « Que s’est-il passé mardi dans l’amphithéâtre Boutmy à Sciences Po Paris ? » Pointant du doigt une « cascade de réactions politiques » en passant soigneusement sous silence la responsabilité des médias qui leur ont donné tant d’écho, le présentateur du 13h use du conditionnel pour parler de la fameuse « interdiction d’amphi » – une première à l’antenne [3] – et fait état de « versions contradictoires » [4]. Non sans agrémenter son reportage de quelques futilités à charge contre les étudiants mobilisés [5], sa collègue concède à sa suite :

[L’étudiante de l’UEJF] est refoulée parce qu’elle est connue pour prendre des photos et les diffuser sur les réseaux sociaux sans autorisation selon des étudiants présents. Personne pour l’instant ne confirme que des propos antisémites ont été tenus à son égard. Elle-même ne les a pas entendus. La seule chose que l’on sait, c’est qu’à la tribune, le comité propalestinien lance : « Attention, l’UEJF est dans la salle. » L’étudiante a pu rentrer dans l’amphi mais elle est très vite ressortie en raison du climat hostile.

Une information bien éloignée de la fake news initiale – abondamment relayée par la rédaction de France Inter –, quoiqu’encore largement lacunaire.


Pouvoir d’agenda, asymétrie des expressions


Au cours de cette séquence en effet (13 – 19 mars), les étudiants jetés en pâture n’auront jamais le luxe d’être entendus directement. Aucune interview, aucun témoignage direct. La ministre de l’Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, bénéficie quant à elle d’un traitement bien différent. Deux prises de parole au total : un extrait d’entretien est diffusé dans le journal de 7h (14/03), on l’a vu, suivi d’une interview en direct dans le journal de 13h du même jour, au cours de laquelle la ministre a toute latitude pour dérouler sa communication en dépit des questions relativement incisives que lui pose Jérôme Cadet [6]. Bilan ? 0 seconde pour les étudiants… et plus de 5 minutes pour Sylvie Retailleau.

Dans les jours qui suivent, une deuxième interlocutrice aura le privilège de l’antenne sur cette affaire : Laurence Bertrand Dorléac, présidente de la Fondation nationale des sciences politiques (« L’invitée de 7h50 », 18/03). Venue faire état d’une enquête administrative en cours, cette dernière ne peut en tout état de cause confirmer ni infirmer le moindre fait, mais tient tout de même à apporter de l’eau au moulin de la disqualification, en pointant notamment des « choses absolument condamnables en ce sens qu’on ne peut pas empêcher un cours ». Il en va là, convenons-en, d’un grief d’un tout autre ordre…

Au cours de cette interview, la journaliste Sonia Devillers critiquera l’emballement du gouvernement et informera y compris les auditeurs de l’existence d’une tribune signée par « 37 étudiants et étudiantes juifs et juives », lesquels affirment avoir été « à l’intérieur de cet amphi, […] chaleureusement accueillis et associés à [la] discussion ». Si le travail contradictoire est bienvenu compte tenu de l’emballement médiatique, il n’enlève strictement rien au traitement structurellement biaisé de France Inter. Car au bout du compte, les choix de la rédaction sont très clairs : ce sont bien les détracteurs des étudiants – et eux seuls – qui disposent du monopole de la parole à l’antenne. Et c’est bien la « polémique » – et elle seule – qui fait l’agenda.

Une « polémique » qui, nous le disions plus haut, laisse des traces : « une mobilisation propalestinienne où certains disent avoir entendu des propos antisémites », peut-on encore entendre sans aucune précision le 19 mars, dans le journal de 19h, dernière production recensée par l’INA sur cette séquence.

Ainsi court la rumeur, aidée en cela par les plus fins limiers du PAF. À l’instar de l’inénarrable Nathalie Saint-Cricq qui, le 17 mars au cours de l’émission « Questions politiques », entend bien tirer cette affaire au clair. Invitée à commenter son « image de la semaine », l’éditorialiste choisit une photo du fameux amphithéâtre Boutmy aux couleurs de la Palestine. C’est alors qu’intervient la leçon de journalisme. Transcription in extenso :

Nathalie Saint-Cricq : Alors… Il y a manifestement une jeune femme qui était connue comme appartenant à l’UEJF, qui dit qu’elle n’a pas entendu directement un certain nombre de propos, mais qui aurait été empêchée de rentrer parce qu’ils auraient redouté qu’elle filme avec son iPhone et que, filmant, les gens soient… bon… Juste pour dire que… [Carine Bécard : Compliqué hein… à démêler… hum.] Tout ça… euh… manifestement, me semble… Plus un certain nombre d’empoignades assez désagréables…

Bref, Nathalie Saint-Cricq ne sait rien. Toutefois, nullement découragée par ses propres errances, elle insiste… et donne même immédiatement la leçon :

Nathalie Saint-Cricq : D’abord, je suis assez étonnée que Sciences Po […], qui est plutôt a priori le temple de la réflexion, soit un endroit où on est pro ou contre et où on ne peut pas discuter. Deux, par le danger de cette importation parce que finalement, quand on est à l’extérieur, on a peut-être plus d’intelligence et de fraîcheur intellectuelle pour essayer de voir quelles sont les solutions pour un État, deux États, et pas simplement proférer des espèces de phrases sur « de la mer au Jourdain » ou « de la rivière à la mer ». Et de voir finalement que Sciences Po est devenu un endroit extrêmement idéologisé et que ça peut être un peu effrayant si ça forme des futurs haut-fonctionnaires, qui a priori doivent servir une cause et non pas prendre fait et cause pour quelque chose de façon aveugle. Et j’ai parlé avec des étudiants, avec une des leaders des mouvements palestiniens qui manifestement, me semble euh… assez caricaturale. Si ce n’est non seulement pro palestinien, mais anti israélien. […] Le 8 octobre, il y aurait pu avoir une gigantesque manifestation de soutien, elle n’est pas venue. Les étudiants ont toujours été là pour discuter, pour débattre. Je ne suis pas certaine qu’avec un keffieh entouré autour de la tête, ce soit le meilleur endroit…

Vous avez dit « chien de garde » ?


***


À vouloir courir trop vite, la rédaction de France Inter s’est une nouvelle fois pris les pieds dans le tapis. Partie prenante d’un emballement politico-médiatique d’ampleur, totalement subordonnée à la communication du pouvoir politique, elle démontre son incapacité à s’extirper des pratiques journalistiques qui font les « polémiques » ordinaires. Et comme le veut la coutume, elle ne présentera aucun mea culpa pour son traitement de « l’affaire Sciences Po ». Mais le bilan le plus important – sur lequel nous reviendrons dans le deuxième volet de cette étude – reste tout de même celui-ci : la couverture de la « polémique » a totalement supplanté le traitement de la mobilisation étudiante. Dans un contexte d’adversité aiguë contre les étudiants, ne pas accorder à ces derniers le moindre temps de parole témoigne déjà d’un rapport pour le moins contrarié à la déontologie. Un second constat finit d’enfoncer le clou : au terme d’une semaine de « polémique », les auditeurs de France Inter ne disposent strictement d’aucune information sur les raisons pour lesquelles, en première instance, des étudiants de Sciences Po ont décidé d’occuper un amphithéâtre. Ni, a fortiori, sur les arguments qu’ils ont fait valoir à l’occasion de cette manifestation. La radio publique a-t-elle fait mieux un mois plus tard ? Affaire à suivre


Pauline Perrenot


Annexe – Quelques précisions méthodologiques


Constitué de 58 contenus, le corpus a été réalisé à partir d’une analyse des notices disponibles sur le site de l’INAthèque, combinée à une recherche manuelle sur les moteurs de recherche et le site de France Inter. Nous avons par la suite écouté l’ensemble des contenus. Si la méthode de recherche via l’INAthèque comporte nécessairement des biais, que nous avions déjà signalés dans un précédent article, elle permet néanmoins une approche relativement exhaustive de la couverture de France Inter.

Nous avons fait le choix de désindexer du corpus les contenus qui n’abordent les mobilisations étudiantes que très à la marge :

  L’interview de Gilles Kepel dans le « Grand entretien du 7/10 » en date du 25 mars 2024. Aucune question ne porte sur le mouvement social et Gilles Kepel l’évoque très succinctement [7]. De même, et pour les mêmes raisons, nous n’avons pas intégré l’interview de l’avocat Arié Alimi par Charline Vanhoenacker (« Bistronomie », 11/05), ni celle de l’écrivain Hervé Le Tellier par l’équipe de « La bande originale » (16/05).

  Plusieurs journaux du 10 mai et une chronique du 17 mai font état du « clash » entre Louis Boyard (LFI) et François-Xavier Bellamy (LR) devant Sciences Po Paris. Les mobilisations n’étant jamais évoquées en tant que telles, nous n’avons pas inclus ces contenus non plus.

 
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La presse sous perfusion de LVMH et de Bernard Arnault


by: Maxime Friot

La presse sous perfusion de LVMH et de Bernard Arnault

par Maxime Friot,

Les millions pleuvent.

LVMH « arrose une bonne partie de la presse en pages de pub » : il y a quelques jours, L’Informé a publié, à partir de chiffres produits par Kantar, « la répartition des dépenses de LVMH dans la presse nationale ». Bilan : les millions pleuvent.

Ces recettes publicitaires bénéficient d’abord aux médias détenus par le groupe LVMH lui-même : entre janvier et septembre 2024, ce sont, toujours d’après L’Informé, 80 millions d’euros bruts [1] qui ont été fléchés vers Le Parisien, Le Parisien Dimanche et Les Échos.


Extrait de la carte « Médias français : qui possède quoi ? », décembre 2023.


Mais c’est aussi la régalade pour les groupes Le Figaro et Le Monde : « La régie média du Figaro a ainsi perçu 32 millions d’euros, dont la moitié pour Madame Figaro et Le Figaro et vous, le cahier spécial luxe et art de vivre du journal. Le groupe Le Monde a engrangé, de son côté, 9,5 millions d’euros bruts. » Paris Match, qui vient d’être racheté par LVMH, ne s’en sortait pas trop mal (3,9 millions), tout comme le JDD (3,5 millions) ou Le Point (1,7 million).

Et ce n’est pas fini, puisque L’Informé précise que L’Express, L’Opinion, Libération, La Croix, La Tribune dimanche ou encore Le Nouvel Obs ont aussi perçu entre quelques dizaines et quelques centaines de milliers d’euros bruts.

La presse est sous perfusion des annonceurs publicitaires – en particulier, on le voit ici, de LVMH. Ce n’est certes pas là son seul mode de financement, mais on ne saurait ignorer qu’elle se met, de la sorte, sous leur coupe. Pour en revenir à notre cas d’espèce, LVMH a déjà démontré sa capacité, en guise de rétorsion, à désinvestir et mettre la pression. L’Informé rappelle l’exemple de Libération : « En 2012, pour rappel, le magnat y avait coupé tous les budgets en rétorsion de la fameuse Une "Casse-toi riche con". Le manque à gagner s’était élevé à 150 000 euros, mettant en péril l’équilibre économique du journal. » Et celui du Monde : « Selon le Canard Enchaîné, le Monde aurait été soumis au même traitement en 2017, perdant 600 000 euros à la suite de ses articles sur les "Paradise Papers" évoquant le recours de Bernard Arnault à des paradis fiscaux. »

Vous avez dit « indépendance » ?


Infographie de l’Observatoire des multinationales.
 
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Audiovisuel public, Marianne, comités d'éthique et compagnie : revue de presse de la semaine


by: Elvis Bruneaux

Audiovisuel public, Marianne, comités d’éthique et compagnie : revue de presse de la semaine

par Elvis Bruneaux,

Critique des médias : une revue de presse hebdomadaire. Si ce n’est exhaustive, au moins indicative [1]. Au programme : du 08/11/2024 au 14/11/2024.


Critique des médias


« Violences à Amsterdam : 24 heures d’hystérie et de naufrage médiatique », Arrêt sur images, 11/11.

« "Médias et féminicides : le temps presse" », NousToutes, novembre 2024.

« Médias de la haine : objectif, guerre civile ? », Off Investigation, 8/11.

« Louis Sarkozy, toutologue le plus pistonné de la télé ? », Arrêt sur images, 9/11.

« Victoire de Trump et "défaite du wokisme" : la voie à suivre en France selon CNews », Télérama, 8/11.

« Hanouna et Trump : d’indigné en 2016 à la fête de la "fin du wokisme" en 2024 », Télérama, 8/11.

« Trump réélu : "les journalistes ont du mal à apprendre de leurs erreurs" », Arrêt sur images, 8/11.

« Ahoo Daryaei : la lutte des femmes iraniennes mérite mieux que ces dessins », Arrêt sur images, 9/11.

« Victorine : 4 ans après sa mort, le roman-photo indécent de M6 », Arrêt sur images, 10/11.

« CNews, France Inter, Le JDD, Le Figaro : le CDJM publie cinq nouveaux avis », CDJM, 8/11.

« "Dites la vérité, vous êtes journaliste !" : En direct sur BFMTV, le député LFI Manuel Bompard corrige l’éditorialiste Yves Thréard sur les résultats de la présidentielle 2022 », Puremédias, 13/11.

« De Trump à Bardella : Jusqu’où l’extrême droite pourra mentir ? », Blast, 10/11.

« Harcèlement scolaire : Attal échappe à la question qui fâche », Arrêt sur images, 12/11.

« Amsterdam : quand les grands médias mentent, les citoyens font leur job », Le Média, 13/11.


Économie des médias


« Rachat de "Marianne" : la société des rédacteurs demande l’arrêt des négociations avec J.-M. Lefranc », Le Monde, 12/11.

« Conflits d’intérêts, sous financements, censure : qui veut enterrer l’audiovisuel public ? », Blast, 14/11.

« Financement de l’Audiovisuel Public : Le retour de la vis sans fin des économies », SNRT-CGT, 12/11.

« "60 millions de consommateurs" ne passera "pas l’année 2025" sans aide de l’Etat, selon les salariés du magazine », Le Monde, 8/11.

« Plusieurs journaux dont "le Monde" et "le Figaro" poursuivent le réseau social X en justice », Libération, 12/11.

« Les pistes de Philippe Carli pour redresser Ebra », La Lettre, 14/11.

« En créant la "Filière audiovisuelle", le PAF veut faire front commun face aux Gafa », Libération, 13/11.


Dans les rédactions


« La SDJ des Échos saisit le comité d’éthique sur les actions LVMH », La Lettre, 13/11.

« Anne Sinclair lâche le comité d’éthique de RMC et BFM TV », 12/11, La Lettre, 12/11.

« France Inter : la victoire de Noëlle Bréham après 40 ans de CDD », L’Humanité, 13/11.


À signaler, aussi


« Contre le climatoscepticisme dans les médias, des députés proposent une loi », Reporterre, 13/11.

« L’Arcom prononce deux nouvelles sanctions pécuniaires contre CNews », Le Monde, 14/11.

« Le livre de Jordan Bardella, un objet marketing propulsé par Vincent Bolloré », Le Monde, 10/11.

« Législation européenne pour la liberté des médias (EMFA) : le droit à l’information fiable est consacré pour la première fois », RSF, 8/11.

« Israël-Gaza : doit-on "fact-checker" l’horreur de la guerre ?, Libération, 12/11.

« Fin de C8 et NRJ12 : les deux nouvelles numérotations envisagées pour la TNT », L’Informé, 12/11.

« Les auditeurs n’ont jamais autant écouté les antennes de Radio France », Le Monde, 14/11.

« Une nouvelle agence France Travail pour les journalistes : un progrès, surtout pour les journalistes pigistes, mais des écueils à corriger », SNJ-CGT, CFDT-Journalistes et Profession Pigiste, 14/11.


Et aussi, dans le monde : Royaume-Uni, États-Unis, Philippines, Bolivie, Bangladesh, Azerbaïdjan, RDC, Burundi, Chine...


Retrouver toutes les revues de presse ici.

 
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